L’environnement socio-économique actuel est à l’origine d’évolutions comportementales
Lors d’une investigation réalisée dans le domaine des produits alimentaires, on a vu se confirmer un certain nombre d’évolutions concernant le comportement d’achat des consommateurs.
Par rapport aux valeurs de référence identifiées à la fin des années 90 et qui mettaient en avant le culte de la différence, de la personnalisation et de la performance, on a pu observer l’apparition d’attentes mettant en avant des référentiels allant dans le sens d’une certaine rationalisation, voire d’une simplification des critères d’achats.
En effet, en réaction à la perception d’une dégradation de leur environnement économique, politique et social, les consommateurs adoptent des attitudes de méfiance face à la multiplicité des risques potentiels. Ceux-ci ont pour effet de relativiser leur attachement aux valeurs d’hier.
Ces évolutions se traduisent par des comportements d’achats plus réalistes et plus pragmatiques relativisant le poids des marques et privilégiant un retour vers les fondamentaux proposées par ces dernières.
Au niveau des actes d’achat, la « raison » prend le pas sur « l’impulsion », le rapport qualité/prix prime l’image de la marque, et la préférence est donnée à la spécificité d’usage du produit plus qu’à sa polyvalence.
En fait, on observe une tendance au rééquilibrage du binôme « consommateurs-marques ». Les premiers ne cèdent plus à l’ascendant hégémonique des secondes et traitent d’égal à égal avec celles-ci.
A l’heure de la mondialisation, les responsables d’entreprises seraient-ils plus à l’écoute de l’interne que de l’externe…
Une récente étude Européenne, visant un nouveau produit d’équipement de la maison, nous a permis d’identifier un nouvel effet collatéral de la mondialisation.
Les résultats de cette investigation, réalisée au stade des consommateurs et des distributeurs, démontraient clairement que le concept innovant répondait à la fois aux attentes domestiques des utilisateurs finaux et aux besoins techniques des professionnels. À quelques nuances près les conclusions visant l’Europe du Nord étaient identiques à celles auxquelles on aboutissait en Europe du Sud.
Quel n’a pas été notre étonnement lorsque l’industriel, après quelques mois d’atermoiement, nous a indiqué souhaiter sursoir momentanément au lancement du produit.
En fait, nonobstant le caractère prometteur des recommandations, le responsable de la holding a soumis le projet à l’ensemble des responsables opérationnels des filiales au sein des pays concernés. Ces derniers ayant fait preuve, comme souvent lorsqu’il s’agit d’un produit nouveau à ajouter à la longue liste des produits existants, d’un enthousiasme plus ou moins marqué, notre interlocuteur a préféré différer l’industrialisation de ce produit.
Le fondement de cette décision s’exprimant comme suit :
Aujourd’hui, à l’heure de la mondialisation des groupes réalisée par croissance externe, les holdings ont besoin du relais effectif et de l’appui stratégique des directeurs de leurs filiales nationales.
Partant de ce principe bien compréhensible, la direction centrale ne souhaite pas entreprendre d’actions qui pourraient à la fois, complexifier la tâche des responsables au sein des pays visés, ou pire encore fragiliser son leadership au yeux de ses cadres dans le cas d’un lancement qui s’avèrerait plus lourd à gérer en raison de son caractère multinational.
Ceci nous conduit à envisager d’interroger, dans le cas d’études visant des produits nouveaux pour le compte de grands groupes internationaux, non plus seulement des échantillons de consommateurs ou de professionnels dans les pays considérés, mais de prévoir d’interviewer l’encadrement interne des filiales nationales.
Le Design hésiterait-il encore entre génie pur et création raisonnée …
Récemment le responsable d’une Agence d’Esthétique Industrielle cru sans doute nous faire plaisir ou bien résoudre une partie de ses préoccupations en nous demandant de bien vouloir lui donner notre avis « d’hommes de marketing » (sic) à l’égard de maquettes destinées à être présentées lors d’une réunion décisive chez les commanditaires du projet … notre réponse sembla le surprendre …
Effectivement, arguant du fait que notre opinion n’aurait que peu de valeur, dans la mesure où nous n’avions aucune légitimité pour donner notre avis sur un concept dont nous ignorions le cahier des charges, nous lui avons rétorqué que notre position « d’hommes de marketing » nous incitait, en revanche, à lui conseiller de procéder d’une façon plus constructive. Nous lui avons, en effet, vivement préconisé de prévoir l’interview de deux profils d’individus : un premier échantillon, représentatif des destinataires du nouveau concept, et un second composé de décideurs dont le profil pouvait s’assimiler à celui de ses commanditaires afin d’anticiper les réactions et de préparer les réponses aux objections potentielles.
Aujourd’hui plus qu’hier, une expression graphique, aussi réussie soit-elle, ne parle plus d’elle-même. Il convient en fait de l’accompagner, voire de la conforter en extrayant ses « plus » et en valorisant son caractère innovant à l’aide d’une analyse en profondeur, mettant en exergue ses « avantages » sur les plans technique, économique, socio-culturel, écologique, artistique, ergonomique, cinématique ….ce type de démarche devenant indispensable, hormis cas exceptionnel, où seule la Signature du Designer suffit à crédibiliser la création….
Encore faut-il relativiser ce dernier cas de figure car nous avons toujours en mémoire l’anecdote suivante. Celle-ci nous a été relatée par le directeur général d’une grande agence spécialisée appartenant à l’un des pionniers historiques du design. Ce grand créatif incontesté « débarquant » lors de la phase finale d’une réunion au cours de laquelle le directeur s’efforçait de valoriser les recherches en énumérant les démarches qui avaient été entreprises pour aboutir aux résultats présentés, ne pu s’empêcher « de signer sa participation » en s’exclamant « qu’une nuit lui avait suffit pour concevoir les conclusions présentées …. ! » Eh oui, le design oscille toujours entre création de génie et création raisonnée …
L’interprétation d’un message publicitaire devient aléatoire quand le décalage est perçu comme une contradiction …
Lors d’un récent test visant la perception d’une campagne multi-médias (Télévision et Presse) par le grand public, on a pu mettre à jour que, selon l’âge de l’individu, le contenu de l’action publi-promotionnelle était reçu différemment et subissait un sort distinct.
En effet, la promesse de la campagne reposait sur une accroche s’appuyant sur la profonde remise en cause, récemment scientifiquement prouvée, d’une vieille idée reçue en matière d’écologie, enseignée et donc assimilée depuis des décennies par les Français, voire mêmes les Européens.
Au cours de l’investigation on a pu identifier deux tendances lourdes à l’égard du thème et de la promesse de la campagne TV :
Les individus, dont l’âge se situe entre 20 et 40 ans, ont spontanément interprété la remise en cause comme un décalage délibéré, volontairement provoquant, en vue d’attiser la curiosité du public, et conduire ce dernier à l’introspection. Ces derniers ont donc fait état d’une large ouverture d’esprit induite par leur formation encore récente. Ils ont donc accepté le nouvel axiome qui les conduira à modifier leurs habitudes.
En ce qui concerne les individus âgés de 45 ans à 65 ans,les résultats se sont avérés beaucoup plus contrastés. En effet, les aînés ont fréquemment adoptés des attitudes plus régressives à l’égard du nouveau postulat qu’ils interprètent comme se situant en contradiction avec les préceptes qui leur ont été inculqués durant toute leur éducation. On a donc souvent assisté à des comportements incrédules, voire même parfois à des rejets purs et simples de la part de personnalités refusant d’accepter, sur la foi d’un message publicitaire, une thèse résolument située à l’opposé de l’idée reçue.
Les annonces presses, plus didactiques parce que plus argumentées, ont toutefois réussi à ébranler ces convictions très établies et ont ainsi permis d’atteindre les objectifs de la campagne publicitaire …
On a pu en déduire, entre autres conclusions, qu’en fonction des âges on n’était pas égaux face aux supports des grands médias et que la complémentarité entre l’image et l’écrit demeurait une réalité… à moins que, chez les jeunes, la notion de décalage se substitue favorablement à l’idée de contradiction, notion moins consensuelle.
Intelligence économique peut-être… mais à quel niveau se situe « l’ intelligence »
Les définitions qui tendent à décrire les contours de cette nouvelle fonction dans les organigrammes sont pour le moins encore très floues, mais peut-être est-ce là le but recherché ?
Si le rôle du DIE (Directeur de l’Intelligence Économique) est d’exercer une veille technologique sécurisée, voire d’anticiper les avancées techniques afin de précéder la concurrence en ayant recours à la quête d’informations externes à l’entreprise, alors il est clair qu’il existe une certaine redondance avec les fonctions des services marketing internes, voire externalisés.
En effet, l’objectif des responsables des départements marketing a toujours été de mettre en œuvre tous les moyens visant à réactualiser les données permettant à l’entreprise d’innover en jalonnant les actions concurrentes à l’aide de « benchmarking » toujours plus pertinents (intelligents ?) …
Maintenant, si comme cela existe au travers d’autres définitions, on a souhaité qualifier une fonction dont la particularité est d’utiliser les nouveaux logiciels visant à collecter et à analyser les informations de toutes natures et de toutes origines, circulant au sein des supports et réseaux électroniques, alors ce poste constituera une nouvelle source d’information à la disposition du service marketing, voire des décideurs dans l’entreprise.
Reste à savoir à qui l’on attribue l’intelligence ?
En effet, les études réalisées auprès des responsables de ces services, utilisateurs de ces nouveaux outils démontrent que si la technologie permet de « recueillir » et de « traiter » les données, en revanche le paramétrage des systèmes de recherche et l’analyse des corpus ainsi obtenus dépendent encore directement de la sagacité du chercheur et de la finesse de l’élaboration des thésaurus.
Le concept d’« intelligence économique » ne correspondrait-il pas plutôt à ce nouvel engouement pour les néologismes qui ont, entre autres, transformé les employés au balayage en techniciens de surfaces… car la préoccupation des hommes de marketing a toujours été de rendre leurs travaux suffisamment intelligibles voire même… intelligents, pour être compris de leurs destinataires. Enfin, si le terme s’est inspiré de la traduction du concept anglo-saxon «intelligence service », alors on entre dans un autre univers.